7 février 2015

L'inhabitée, de Maia Brami


 

Coup de coeur

« Cet enfant existe entre mes cils. Et parce qu’il existe entre mes cils, j’ai la certitude soudain que seule l’écriture pourrait lui donner corps, le faire advenir, qu’il me faut à tout prix inverser le mouvement, que ce qui m’assèche serve de terreau, que le vide remplisse la page pour qu’enfin naisse un greffon de ma chair stérile. »

Editeur : éditions de l’Amandier, Parution :  26 février 2015


 
Coup de cœur pour ce roman poignant sur le désir d’enfant et la maternité interdite. Maïa Brami, sublime la douleur du manque pour donner naissance à un texte littéraire intense, intime et rare, résolument tourné vers la vie. 

Dans un «texte matière », un « patchwork de mots » Maïa tisse les paysages intimes des pensées, sensations et émotions qui jalonnent l’histoire d’une femme, d’un couple en désir d’enfant, en quête, de vie, de soi. Elle fait entendre la petite musique, les refrains, de la femme inhabitée. Elle joue « une partition pour voix seule », une partition singulière, en même temps qu’elle ébauche la cartographie d’une traversée en terre d’infertilité, dans laquelle nombre de femmes se reconnaîtront. De l’évidence du désir  à l’impuissance à incarner, de l’abîme du vide à la plénitude de l’être et du devenir soi, elle marche son chemin : « Devenir une en s’épluchant les peaux mortes de l’histoire. Gommer les aspérités, se faire une place en soi, tel un écrin, poncer, souffler, poncer, souffler, s’attendrir, faire place nette pour s’y déposer ensuite, comme le cœur dans la corbeille des côtes, le fœtus dans son cocon rouge.» 

 
J’avais 1001 questions à lui poser. J’en ai choisi quelques-unes. Vous serez certainement sensibles à la musique de ses mots et à son talent pour donner poser une parole incarnée.
 

 
 
L’interview

 
1001 fécondités – Maïa, comment est né ce livre ? et son titre ? Pourquoi et pour quoi « L’inhabitée » ?

 Maïa Brami  -  Il est né d’une urgence, urgence à me remettre à la vie, après plusieurs années sans parvenir à écrire tant j’étais anéantie par mon incapacité à tomber enceinte. Me sentant asséchée, stérile, l’écriture ne me venait plus et puis, face à l’évidence de la procréation, créer me semblait futile. Je publie aussi des livres pour la jeunesse et aller à la rencontre de mon public m’est devenu une torture. Petit à petit, je me suis effacée, retirée quelque part, au fond de moi-même, inaccessible aux autres et à mon compagnon. J’étais au bord de la dépression. Et les médecins, à ce stade, n’avaient pas encore réussi à identifier mon problème. Un beau matin, j’ai compris qu’il fallait que je me ressaisisse. J’ai rouvert mon ordinateur et j’ai commencé ce roman sous forme d’enquête pour essayer de mettre des mots sur cette souffrance, faire naître du sens de cette épreuve, me (re)trouver.